« tonight, this is your night »

L'alcool était quelque chose qui vous fortifiait contre les problèmes. Il n'y avait qu'à voir les picoleurs du bar de la ville pour le savoir. L'alcool était un remède efficace pour espérer avoir quelques moments de bonheur, même superficiels. A partir du moment où tout allait dans le meilleur des mondes, vous n'en demandiez pas plus. En tout cas, Elizabeth n'en demandait pas plus. La blondinette s'était réfugiée derrière quelques bouteilles depuis la mort de son frère. La consolation que lui prodiguait Odessa ne suffisait plus pour soutenir le moral terni de la jeune Silvestri. Elle était à l'aube de ses vingt-un ans, mais voilà qu'elle avait déjà la mine triste et renfermée des vieux et derniers jours. Bien sûr, elle sait bien qu'il y a pire dans la vie, dans le monde que ce qu'elle subissait. Des familles connaissaient des parents qui mourraient tous les jours. Pour certains, c'était même quotidien. Elle devait donc s'estimer chanceuse, voir le bon côté des choses, être optimiste. Faire comme d'habitude. Mais qui aurait l'envie, la force et le courage, ainsi que les raisons de voir le bon côté des choses alors que votre frère est mort ? En tout cas, la jeune italienne en était incapable. Elle n'arrivait plus à tenir sur ses jambes. Non physiquement, mais moralement. Elle avait été atteinte directement par l'esprit et le moral. Le sourire qu'elle prodiguait devant les caméras se flânait de jour en jour. Et pourtant, elle faisait comme si ne rien n'était. Évidemment, toute la ville était bien au courant de la mort de Milo Silvestri, il y a quelques semaines plus tôt, tué par un lycan. Sa famille - dont elle était une des héritières - était bien trop réputée pour que l'annonce passe sous silence. Et personne n'était idiot au point de croire le sourire charmant et sans histoire que pouvait différer la jeune Beth partout. Beth avait mal, elle souffrait, elle criait, mais silencieusement. La blonde ne voulait pas attirer les regards sur elle ni voir une dizaine de mains à mouchoirs lui pendre sous le nez. Et puis, elle était bien trop fière pour se baisser à divulguer ses sentiments. Alors, elle restait la charmante blonde Silvestri, toujours souriante et qui possédait un optimiste à tout épreuve.

Ce soir là, Beth savait que Odee n'était pas de service. Elle pouvait donc se permettre d'aller étouffer sa soif sans trop de problème. Non qu'Odee soit vigilante pour son travail - après tout, Beth n'avait pas encore vingt-an ans - mais elle était surtout assez protectrice envers la jeune Silvestri. Et cette dernière lui pesait parfois sur les épaules. Mais elle se taisait car, dire qu'elle n'aimait pas être protéger, couver par quelqu'un d'autre que sa famille n'était pas agréable, serait mentir. C'était donc en silence que Beth se pliait au retrait de son verre quand Odessa avait décrété qu'elle avait assez bu comme ça - autrement dit, au bout d'un verre et demi environ. C'était donc d'un pas presque guilleret que la blonde se dirigea vers le bar à 11.30 pm passé. Même si elle savait s'amuser, Elizabeth n'avait pas l'habitude de venir tous les soirs comme certains jeunes le font. Même ses amis viennent régulièrement. Et ils ne comptent plus le nombre de tentatives échouées de faire venir Beth avec eux. La jeune Silvestri s'était donc éloignée de ses amis, peu à peu. Seuls quelques uns pouvaient comprendre et accepter son refus ; notamment Giuliana ou encore Delilah voire même Odessa. Elles avaient supporté la douleur et l'humeur massacrante de la blonde pendant un long moment mais ne l'avaient jamais abandonné. Il faut tout de même préciser que ces femmes ne sont pas des personnes comme les autres ; elles possèdent une force morale très forte et de quoi équilibrer l'esprit de Beth. A elles trois, elles étaient différentes et cela était fortement apprécié par Beth. Leurs points de vue différents, leurs visions différentes lui permettaient une plus large ouverture d'esprit. Sans elles, Beth ne serait pas grand chose, en ce moment même.

- Sers-en moi un autre.
- Vous êtes sûre, mademoiselle ? Vous avez déjà bu plus de...
- Bien sûr, que je suis sûre ! Boucles-là et obéis. Le client est roi, à ce que je sache.

Ce fut donc d'un pas pressé que le barman - le même qui lui servait des verres depuis son arrivée - s'active à la tâche. Beth regarde son verre vide d'un air las, la main sur le front et à moitié replié sur le comptoir. Elle songeait. Pas vraiment sur une idée précise mais sur la vie en général ainsi qu'à la mort. Maintenant qu'on côtoyait des vampires et des lycans - à quand les licornes et les fées ? - un peu tous les jours, on pensait beaucoup plus à ces choses-là. C'en deviendrait presque philosophique. Ses pensées furent arrachées quand elle entendit le bruit du verre contre le bar. Se redressant de tout son buste, Beth attrape le mini-verre et le boit cul-sec, comme elle le fait si bien depuis tout à l'heure. Les minutes trottaient avant que son regard ne soit posé sur l'entrée. Comme beaucoup de personnes dans la salle, Beth avait été attiré par un groupe de personnes qui venaient d'arriver. Ils étaient en nombre assez imposant et possédaient une certaine prestance qui faisait tourner la tête à tout le monde vers eux. La jeune blonde scrute un moment ces visages fermés avant d'en reconnaitre un. Plissant légèrement les sourcils, elle essaye de se rappeler pourquoi elle le connaissait - après tout, l'alcool lui montait à la tête et son esprit était tout autant embrumé. Puis, tout s'éclairait au fur et à mesure que le jeune homme en question avançait vers le bar. Beth reste un moment dans ses songes avant de sauter du tabouret où elle séjournait depuis plus d'une heure et de se diriger vers le jeune homme - lui avait-il dit son prénom, déjà ? si oui, elle ne s'en souvient pas. Elle était plutôt ravie de sa démarche assurée malgré le gisement d'alcool qu'elle avait dans les veines. Arrivée à sa hauteur, la demoiselle se mit sur un de ses côtés et commande un nouveau verre au barman qu'il y avait - celui-là ne pouvait rien dire, ce n'était pas le même. Puis, la blonde se tourne vers le jeune homme, un léger sourire aux lèvres.

Mon sauveur est venu reprendre des forces pour mieux sauver d'autres personnes par la suite?